Jésus et les malades - Frère Chrystophe Randrianbololona o.p.

« JÉSUS ET LES MALADES :

LE SACREMENT DE L’ONCTION DES MALADES »

Conférence de Carême 2018. Cathédrale. Saint-Denis/La Réunion. France.

INTRODUCTION

I- JÉSUS ET LES MALADES SELON l’Évangile de SAINT LUC

1-     L’Évangéliste saint Luc.

2-     L’Évangile de saint Luc : un Évangile de la miséricorde et de la compassion divines.

3-     Le péché est comme une maladie à guérir :

  1. a)Le propos de la femme pécheresse.
  2. L’histoire de Zachée.
  3. c)Le reniement de Pierre.
  4. d)Le bon larron qui s’est converti.

II – LE SENS SPIRITUEL DE LA MALADIE

1-     Qu’est-ce qu’une maladie ?

2-     Le sens spirituel d’une maladie. 

3-     Les paraboles de la miséricorde comme récits de guérison intérieure.

  1. a)Le problème du fils prodigue considéré comme un mal-être.
  2. b)Le péché est comme une maladie à guérir.
  3. c)La guérison physique et la libération de l’homme de la possession de la force du Mal.

II – L’ONCTION DES MALADES COMME SACREMENT DE L’ÉGLISE

1-     L’onction des malades : un sacrement de l’Église pour accompagner les personnes malades.

2-     L’onction des malades : manifestation de la miséricorde et de la compassion de Dieu dans le Christ.

CONCLUSION

INTRODUCTION

Chers frères et sœurs, bienvenus dans cette cinquième conférence de Carême où nous voulons approfondir un peu plus notre connaissance sur Jésus-Christ et notre relation avec Dieu. Le Carême est effectivement ce temps où l’Église nous invite à nous mettre en face de notre propre conscience et notre foi vis-à-vis de nous-mêmes, vis-à-vis des autres mais surtout vis-à-vis de Dieu.

Quatre approches se sont déroulées pour nous apporter quelques éléments et quelques témoignages de la foi, pour nous rappeler des attitudes que nous devrions adopter durant ce temps de carême, mais surtout pour suivre Jésus-Christ. Ces quatre conférences ne vous ont pas seulement démontré la présence et la force de Jésus dans la mission salvifique qu’Il menait, mais elles ont également montré avec qui Il était, et comment de quelle manière Il est encore témoigné aujourd’hui par des croyants.

C’est encore sur ces témoignages de la foi en Christ, donc, que ma conférence d’aujourd’hui veut s’appuyer. Il s’agit pour moi de vous montrer la présence de Jésus dans la vie des personnes dites « fragiles et affaiblies » par les maladies, non seulement pendant la période où Jésus était avec ses disciples au début de la Prédication de l’Évangile, mais encore aujourd’hui dans la vie de chaque personne souffrante. C’est ce dont l’Église veut nous témoigner à travers le sacrement de l’onction des malades au moyen duquel Jésus-Christ se rend présent auprès des personnes malades.

Alors pour mener à bien cette conférence, comme il s’agit de montrer Jésus avec les malades, j’ai choisi pour vous, dans la première partie, l’Évangile selon saint Luc qui pourrait mieux nous renseigner sur la proximité de Jésus avec les malades. Dans la seconde partie, nous essayerons de voir ce que peut être le sens de la maladie où il est question, pour moi, de vous inviter à poser un autre regard plus généreux et plus humain sur les personnes malades. Et nous finirons avec une troisième partie dans laquelle je vous rappellerai quelques éléments pour comprendre le sacrement de l’onction des malades dans l’Église catholique.  

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I- JÉSUS ET LES MALADES SELON L’ÉVANGILE DE SAINT LUC

En entendant ce titre de ma première partie, certains d’entre vous pourrait se poser la question : pourquoi parler seulement de l’évangile de saint Luc alors que les trois autres, saint Matthieu, saint Marc et saint Jean, ont également rapporté des récits de guérisons effectuées par Jésus.

Bien sûr que oui, tous les quatre évangélistes nous montrent Jésus comme étant un guérisseur. Mais si nous avons choisi l’évangile de Luc comme référence c’est parce que, ce qu’il nous rapporte, est plus près de la réalité et de la Vérité que nous voulons évoquer dans cette conférence : d’abord saint Luc était médecin avant de suivre Jésus, ayant donc déjà des expériences de contact humain, avec des personnes, surtout avec des malades. Mais une raison de plus, l’évangile de Luc est présenté comme celui de la miséricorde et de la compassion divines dont il est question dans le sacrement de l’onction des malades.

Cependant il est difficile pour nous de comprendre l’évangile rapporté par saint Luc sans connaître au moins quelques éléments de son identité : qui est

1-     L’évangéliste saint Luc ?

Des témoignages datant du IIe siècle, comme celui de saint Irénée de Lyon (Père de l’Église dans cette même période, entre 177-202) et celui du Fragment de Muratori (la plus ancienne liste connue d'écrits considérés comme authentiques (« canoniques ») par les chrétiens), parlent de Luc comme auteur d’un troisième évangile. D’après ces témoignages, Luc était d’Antioche de Syrie, médecin de profession (Col 4, 14), il ne fut pas apôtre mais disciple des apôtres (2 Tm 4, 11 ; Phm 24) ; il n’était pas Juif mais d’ascendance païenne. Il était un homme cultivé qui n’avait ni femme ni enfant et mourut à l’âge de 74 ans (84).

Saint Luc a du écrire l’évangile vers l’an 80, des écrits qui étaient dédiés à un certain Théophile, mais aussi aux communautés chrétiennes venues du paganisme, comme lui, et de la culture hellénistique parmi celles déjà évangélisées par l’apôtre Paul en Asie Mineure et en Grèce. Les propos de Luc n’étaient pas seulement adressés aux seuls chrétiens qui étaient là mais aussi à tous ceux qui étaient susceptibles de recevoir la foi en Jésus-Christ.

Il est important de souligner que l’évangéliste saint Luc a la particularité d’avoir écrit une œuvre en deux volumes à savoir l’Évangile et les Actes des Apôtres. Et comme l’évangéliste Marc, après l’évangile de l’enfance de Jésus, aux chapitres 1 et 2, saint Luc nous montre deux grandes étapes du ministère de Jésus avec ses disciples, à savoir le ministère en Galilée et celui à Jérusalem.

Selon certains exégètes du Nouveau Testament, saint Luc est parmi les écrivains de grand talent avec une âme délicate qui évite de blesser ou de choquer ses lecteurs. Des caractères déjà révélateurs de l’évangile de la compassion et de la miséricorde qu’il nous a rapporté. Saint Luc avait également su situer les événements de l’évangile dans le cadre de l’histoire universelle (Lc 2, 1-3 ; 3, 1-2) pour bien nous montrer le sens de l’Incarnation du Fils de Dieu.

Tous les évangélistes abordent effectivement l’aspect de l’Incarnation, chacun à sa manière, mais l’évangéliste saint Luc met plus l’accent sur la personne de Jésus comme Sauveur d’une humanité déchue par le péché et par la maladie. D’où la présence assez importante des vocables comme « sauveur », « sauver », « salut », le salut qui se trouve dans la personne de Jésus (2, 11 ; 19, 9 ; 23, 43).  

Nous pouvons trouver également d’autres noms de Jésus, comme on relève chez les autres évangélistes : le titre Seigneur (103 fois), Jésus (89 fois) ; Fils de l’homme (25 fois) ; Christ (19 fois) ; Fils de Dieu (6 fois).

2-     L’évangile de saint Luc comme évangile de la miséricorde et de la compassion divines

L’objectif de tous les évangélistes étaient de montrer Jésus, en relatant dans leurs récits ce qu’il était et ce qu’il avait fait. Chaque évangéliste présente Jésus selon la foi et la conviction avec lesquelles l’Esprit du Ressuscité les avait animé, pour que ceux qui l’écoutent reconnaissent en Jésus le vrai Fils de Dieu, envoyé pour sauver le monde.

À sa manière, saint Luc voulait montrer un Jésus « le plus attrayant possible », en relatant des récits qui reflètent la miséricorde et la compassion de Dieu envers les hommes. En cela, il a montré comment Jésus était le plus proche des pauvres, des pécheurs, des nécessiteux, des femmes méprisées et de tous les autres marginaux de la société juive.

Ces personnes n’étaient pas seulement considérées comme mises à part par la société, mais elles étaient aussi comme des personnes perdues, éloignées de Dieu. J’ai bien souligné le mot « perdu » parce que ce mot va se répéter durant mon exposé.

Donc, compte tenu de sa grande culture qui permettait à saint Luc de s’ouvrir vers les autres, il était convaincu dans son for intérieur que la venue de Jésus était une manifestation de Dieu qui se voulait proche de ses enfants, en recherchant prioritairement ceux qui étaient perdus. La miséricorde de Dieu dans ce sens peut s’expliquer par l’envie de Dieu de retrouver ses enfants « sains et saufs » de tout le mal qui peut les rendre malades.

Concrètement, entre autres récits, saint Luc nous rapporte des paraboles (que nous verrons tout à l’heure) dont l’objectif du Seigneur Jésus est de nous montrer un Père « plein de tendresse pour ses enfants », un Père toujours attentif malgré les nombreux péchés de ses enfants, le péché étant la cause principale qui nous éloigne de Dieu jusqu’à la perte totale de notre filiation avec Lui.

Parmi ces paraboles, nous pouvons prendre en exemple celle du chapitre 15, 1-3. Jésus commence par des échanges assez vifs avec les pharisiens et les scribes qui se moquaient des pécheurs alors que Jésus ne prenait pas de distance par rapport à eux : « Les publicains et les pécheurs venaient tous à Jésus pour l'écouter. (Alors que) Les pharisiens et les scribes récriminaient contre lui : « Cet homme fait bon accueil aux pécheurs, et il mange avec eux ! »

Dans ce même ordre, trois paraboles sont citées successivement dans le chapitre 15 : celle de la brebis perdue (15, 3-7), celle de la pièce d’argent perdue(15, 8-10) et celle du fils prodigue considéré comme perdu(15, 11-32). Ces trois paraboles font l’apologie « des perdus retrouvés » qui font la joie de leurs propriétaires ou de leurs maîtres. De même pour le Père céleste pour un pécheur qui se convertit : « …il y aura de la joie dans le ciel… plus que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n'ont pas besoin de conversion (15, 7).

Ce que nous venons de dire sur la miséricorde de Dieu ne nous informe pas seulement sur ce qui est de Dieu, mais il nous indique aussi que :

3-     Le péché de l’homme est une maladie à guérir :

À part la parabole du fils prodigue, considéré comme un « perdu retrouvé », les récits qui suivent sont aussi pertinents que semblables, car nous pouvons retrouver la même idée ou le même objectif que celui dans les paraboles susdites : Saint Luc nous rapporte des rencontres où Jésus était cerné par ses détracteurs pour faire face à ceux qu’ils avaient considérés comme pécheurs parce qu’ils avaient « vendu leurs âmes au diable », comme on dit.

a) D’abord, le récit de la femme pécheresse qui s’est trouvée dans la maison du pharisien où Jésus était invité (7, 36-50). Ceux qui étaient présents savaient que cette femme était pécheresse et Jésus le savait aussi. En revanche, les autres invités ne comprenaient pas vraiment ce que la femme était en train de faire mais Jésus savait qu’elle faisait des gestes de réparation pour ses nombreux péchés. Mais pour que cela soit possible, la pécheresse devait reconnaître en Jésus le Fils miséricordieux du Père, capable d’absoudre ses péchés. Alors sans résister, Jésus déclarait que « ses nombreux péchés étaient pardonnés parce qu’elle montrait beaucoup d’amour ».

L’amour et la miséricorde de Dieu, se croisant avec l’amour et avec la reconnaissance de ses nombreux péchés, a permis à la femme pécheresse de retrouver sa nouvelle vie comme fille bien-aimée de Dieu.

b) De même, l’histoire de Zachée (19, 1-10) rapportée par saint Luc nous montre également l’amour et la miséricorde de Dieu manifestés en son Fils Jésus. Zachée était considéré comme un homme pécheur car il était publicain, collecteur d’impôts pour les Romains donc un traître, manipulant de « l’argent sale » pour ses compatriotes.

Or, comme la femme pécheresse, Zachée avait envie de remettre de l’ordre dans sa vie car il reconnaissait ce mal intérieur qui l’empêchait d’être en connivence avec ses compatriotes. C’est pourquoi, il avait décidé de rencontrer le Seigneur, le seul capable de le remettre en bon état d’esprit. Mais voilà que c’est le Seigneur lui-même qui se fait inviter chez lui pour qu’il reconnaisse davantage que l’amour et la miséricorde de Dieu sont plus grands que ses péchés.

En effet, Zachée a fait l’expérience d’une rencontre inattendue où Dieu se fait plus proche des pécheurs, et Jésus Lui-même déclarait « que le salut est entré dans sa maison car il est venu chercher et sauver ce qui était perdu ».

c) Le reniement de Pierre

Saint Luc ne nous rapporte pas seulement des rencontres de Jésus avec « des pécheurs ordinaires », si je puis dire, et qui ont reçu le pardon de leurs péchés, mais il y avait, aussi, quelques disciples comme Pierre, à qui Jésus avait montré la grandeur de l’amour et de la miséricorde du Père.

Pierre était considéré comme le premier dans le collège des disciples, le plus ancien, et peut-être l’adjoint de son Maître. Pierre avait juré devant Jésus de ne pas l’abandonner, voire mourir pour lui et avec lui s’il le fallait. Mais voilà qu’au moment des épreuves du procès, Pierre l’avait renié trois fois (22, 56-62). Quoi qu’il en soit, Jésus lui a pardonné en lui confiant, par trois fois, la garde de son troupeau.

Le reniement de Pierre était considéré comme une trahison envers son maître, donc un péché grave. Ses pleurs signifiaient qu’il était dans « un mal » que lui-même ne pouvait pas expliquer. Cependant par sa reconnaissance, le Seigneur va le guérir de ce mal en lui pardonnant sa faiblesse. Malgré ses péchés graves, l’amour de Dieu, rencontrant l’amour et le regret de Pierre, effaçe tous ses péchés et il est guéri.

d) Le bon Larron qui s’est converti (23, 38-43)

Enfin, la miséricorde et le pardon de Dieu relatés par saint Luc se manifestent jusqu’à la Croix. Envers le bon Larron qui s’est converti, Jésus ne lui avait promis qu’une chose : le Paradis. Comme la femme pécheresse, Zachée et Pierre, le bon larron reconnaît que Jésus est Dieu, capable de lui faire miséricorde malgré ses crimes.

Voilà ce que nous pouvons dire sur la miséricorde de Dieu, manifestée en Jésus, rapportée par saint Luc. La miséricorde de Dieu était donnée parce que ces différentes personnes en avaient besoin pour qu’elles soient guéries du mal qu’elles avaient commis.

II – LE SENS SPIRITUEL DE LA MALADIE

Étant donné que la conférence que je vous donne a pour but de montrer Jésus avec les malades, il m’est important de vous parler d’abord de ces rencontres de Jésus avec les malades dans l’évangile selon saint Luc, avant de parler du sens spirituel de la maladie.

Cela peut nous inspirer et nous permettre de donner quelques éléments sur la maladie et la personne malade. Voyons donc, d’abord, la maladie :

1-     Qu’est-ce qu’une maladie ?

Tout le monde a certainement fait l’expérience d’une maladie et donc a été malade. Quand on est malade, on ne cherche pas à définir la maladie ou ce que l’on ressent, on cherche plutôt à s’attaquer immédiatement à la maladie en allant chez son médecin. Et cela parce que, ou bien nous avons vraiment mal à cause des douleurs qui nous empêchent de vivre comme il faut, ou bien parce que nous avons un ou des symptômes d’une maladie dangereuse qui pourrait même nous entraîner vers la mort.

Nous avons donc une maladie parce que nous nous retrouvons dans l’un de ces cas que je viens de décrire. En revanche, « la maladie » ne se définit pas seulement par les douleurs et les symptômes que nous avons. Selon la définition de François Pellet (Docteur en philosophie au sein du Département de l’université de Münster), « on peut distinguer généralement entre deux théories de la maladie : une théorie suivant laquelle la maladie est une valeur vitale négative, et une théorie selon laquelle la maladie est un dysfonctionnement biologique ». Retenons-le, ou bien la maladie est « une valeur vitale négative » ou bien la maladie est « un dysfonctionnement biologique ».

Prenons la première définition : elle semble nous proposer à regarder la maladie par rapport à la valeur ou aux valeurs que nous pouvons donner à la vie. Et nous savons que toutes les valeurs qu’on donne à la vie sont différentes selon la culture de chaque peuple. Mais ce qui pourrait être l’unité centrale de toutes ces valeurs, c’est la conviction sur la défense de la vie contre tout ce qui peut l’entraver et l’anéantir. C’est la valeur commune que l’homme partage avec les autres animaux qui luttent tous pour la survie.

Mais en tant que chrétien, la valeur vitale de notre vie est plus qu’une valeur de survie temporaire, propre à l’animal. Notre valeur vitale doit tenir compte de l’espérance d’une vie éternelle qui s’opposerait à une survie terrestre.

Notre valeur vitale doit s’enraciner dans la conscience que nous avons de nous-mêmes et de notre existence, mais surtout de l’image et de la ressemblance que nous avons de Dieu. C’est pour cette raison que Maxime Gimenez, dans son livre sur « La guérison spirituelle »nous parle de la guérison d’une maladie comme « une expérience qui emprunte le chemin de la vie, menant à la connaissance de soi… pour que la vie s’éveille à la conscience de ce qu’elle est et de "qui" elle est ».

Cela signifie que si la maladie est définie comme « une valeur vitale négative », c’est tout notre être intérieur et spirituel qui se trouve dans une certaine négativité ou dans un certain désordre – si j’ose dire – et nous empêche d’être bien avec nous-mêmes et avec Dieu. Dans ce sens, nous sommes malade parce que nos relations avec Dieu et avec les autres, ainsi que nos convictions fondamentales par rapport à notre existence et à l’existence de Dieu, sont perturbées ou brisées.

La seconde théorie, démontrée par François Pellet, selon laquelle la maladie se définit comme « un dysfonctionnement biologique » pourrait mettre tout le monde d’accord. Un organe est en dysfonctionnement parce qu’il ne fonctionne pas correctement. Notre estomac est malade parce qu’il n’arrive pas à digérer, même la moindre nourriture que nous avons ingurgité. Une définition par laquelle la maladie se manifeste par le ralentissement ou par l’arrêt temporaire du bon fonctionnement d’un organe.

Mais comme dit toujours Maxime Gimenez, « les maladies les plus profondes ne sont pas celles qui affectent le bon fonctionnement de ses organes mais celles qui altèrent le tissu vivant de ses relations », c’est-à-dire que nos deux définitions semblent être complémentaires. Nous avons besoin de l’une et de l’autre pour nous rendre compte de la présence d’une maladie dans notre corps. Nous avons besoin de l’une et de l’autre pour comprendre davantage les guérisons opérées par le Seigneur Jésus durant la période de sa prédication.

2) Le sens spirituel d’une maladie 

Quand nous disons « spirituel », nous pensons à quelque chose de plus important et de plus noble. Nous pensons aussi que le mot « spirituel » rime toujours avec le mot « divin » d’où la sacralisation et, parfois, la crainte devant tout ce qui est « spirituel ». Mais étant donné que le mot spirituel vient du mot « esprit », il y a un risque de nous confondre, car il y a « esprit » et « Esprit ». L’esprit avec un petit « e » nous renvoie à l’esprit de l’homme tandis que l’Esprit avec un grand « E » pour l’Esprit de Dieu. Ainsi, le sens spirituel d’une maladie peut donc exister selon ces deux nuances.

Dans la première nuance, le sens spirituel d’une maladie consiste à comprendre ce qu’est l’état d’esprit d’une personne malade. Quand une personne sait qu’elle est malade ou qu’elle porte une maladie, son état d’esprit est immédiatement atteint. La personne malade prend conscience qu’elle n’est plus dans son état normal pour pouvoir faire ce qu’elle veut. Elle prend également conscience qu’à cause de sa maladie, sa force peut diminuer, et donc sa vitalité et sa capacité se réduisent. Elle finit par se déclarer elle-même comme incapable de faire et d’agir selon sa volonté.

De fait, cette première nuance du sens spirituel de la maladie rejoint la première théorie de François Pellet selon laquelle une maladie se définit comme « une valeur vitale négative », car les éléments qui permettent à l’homme de montrer ce qu’il est, sont en défaillance. L’homme n’est pas seulement malade dans son corps mais il est atteint aussi dans son esprit ou dans son âme intérieure.

C’est-à-dire qu’une personne malade ne doit pas seulement être soignée dans son corps mais aussi dans son esprit affecté par la maladie.

C’est donc dans la seconde nuance du sens spirituel de la maladie que nous allons pouvoir parler de ce à quoi tout le monde peut s’attendre : du sens de la maladie selon l’Esprit de Dieu qui œuvre dans le cœur de l’homme, mais surtout l’Esprit de Dieu avec lequel le Seigneur Jésus a guéri les malades.

Pour cela, c’est la parole de Jésus Lui-même qui peut nous éclairer. Quand Lazare, frère de Marthe et Marie était malade, on demande à Jésus de venir vite pour le guérir. Mais il répond que « Cette maladie n’aboutira pas à la mort, elle servira à la gloire de Dieu : c’est par elle que le Fils de Dieu doit être glorifié. » (Jn 11, 4). Qu’est-ce que cela veut dire ?

Pourquoi Jésus parle de la gloire de Dieu qui doit être manifestée en Lui, alors qu’il s’agit seulement de guérir un pauvre malade qui était Lazare son ami ? La gloire de Dieu doit-elle passer avant la vie de l’homme ?

Des questions qui peuvent nous embrouiller et nous diviser. Mais si nous restons dans l’idée de la gloire de Dieu, sachons que ce n’est pas grâce à l’homme que Dieu est glorieux. Encore moins, ce n’est pas à cause des autres éléments fondamentaux de la vie comme la terre, l’eau, le feu, l’air que Dieu a créé Lui-même. Dieu est déjà glorieux en Lui-même. Néanmoins, sa gloire peut être visible dans ses créatures, sa gloire se manifeste « dans tout ce qui vit et respire », comme dit un chant religieux que certains d’entre vous connaissent.

Alors si l’homme est la première de toutes les créatures de Dieu, sa gloire doit se manifester dans l’homme et par l’homme. Mais ce n’est pourtant pas dans l’homme malade ni dans l’homme avec toutes ses imperfections mais dans l’homme sain et dans l’homme vivant. Encore saint Irénée de Lyon (Père de l’Église au IIe siècle) écrivait que : « La gloire de Dieu c’est l’homme vivant ». C’est-à-dire, c’est dans l’homme vivant que la gloire de Dieu peut s’observer pour ceux qui veulent le croire et le voir.

Ainsi, si Jésus dit que la maladie de Lazare sert à la gloire de Dieu, c’est parce que la première mission de Jésus est de montrer ce que Dieu est en Lui-même, mais aussi de montrer que Dieu nous aime, Dieu est en relation avec nous, en Lui, Jésus, nous pouvons devenir « fils et filles » de Dieu.

Cela signifie, que la maladie comme un état d’imperfection de l’homme pourrait mettre des obstacles à cet objectif où l’homme doit être le reflet de la gloire de Dieu. La maladie comme le péché de l’homme ne contribuent pas à montrer que Dieu est glorieux mais, plutôt, ils ternissent l’image et la ressemblance d’un Dieu glorieux dans l’homme. C’est pourquoi Jésus veut, coûte que coûte, que l’homme soit guéri de sa maladie, que l’homme soit sauvé de ses péchés pour témoigner de la gloire et de la puissance de Dieu.

Bref, une maladie doit être guérie pour « que la vie s’éveille à la conscience de ce qu’elle est et de "qui" elle est », selon Maxime GIMENEZ. Autrement dit, la vie qui s’éveille en l’homme doit montrer qu’elle est sacrée parce qu’elle est un reflet la gloire de Dieu. Nous retrouverons encore quelques éléments du sens spirituel de la maladie dans la troisième partie où nous parlerons de l’onction des malades.

3-     Les paraboles de la miséricorde comme des récits de guérison intérieure.

  1. a)Le problème du fils prodigue considéré comme un mal-être intérieur :

L’histoire du fils prodigue avec son père nous rappelle bien la situation de l’homme devant Dieu le Père. Soulignons l’aspect d’une vie heureuse et de la liberté que cette famille avait, pour revenir sur toutes les merveilles que Dieu peut nous donner. Dieu a effectivement créé le monde avec tous ses habitants et ses merveilles et a placé l’homme pour qu’il en soit le maître et qu’il en soit heureux.

Mais on dirait que l’homme entouré par ces biens inestimables, ne les supporte pas. Au lieu d’être heureux avec ce qu’il a, l’homme s’enferme et se laisse aveugler par ces biens, au point qu’il ne voit plus leur grandeur. C’est pourquoi il veut chercher « un autre bonheur » qui ne vient pas d’autrui mais qui vient de lui-même. Hélas, il ne trouvera pas, son cas s’aggrave et il demandera secours auprès du précédent Donateur, capable de lui rendre le bonheur perdu.

Tel était le cas de l’enfant prodigue, relatée par saint Luc. Le fils demande sa part à son père croyant qu’il vivrait une vie meilleure en quittant le bonheur familial. Mais hélas, « il se fait du mal pour rien ». Il s’est donné une maladie dont le seul remède est le retour au Père. C’est seulement avec le Père qu’il peut retrouver un bonheur semblable au précédent. Et cela, parce que le Père est capable de lui donner, en même temps, la liberté et de la restaurer quand le mal l’a brisée. Dans son amour infini, le père pardonne, montre son amour envers le fils en lui pardonnant toutes ses fautes, quel que soit son comportement et sa maladie.

C’est l’image de Dieu de miséricorde qui se rend visible à travers son Fils Jésus Christ : les péchés et la fragilité de l’homme ne change rien à la nature de Dieu, Amour et Bonté. L’amour de Dieu ne va pas sans le pardon et vice versa, et le pardon de Dieu se présente comme une guérison intérieure donnée à l’homme après avoir reconnu ses péchés. Ce qui signifie que :

  1. b)La guérison physique peut être liée à la libération de l’homme intérieur, ligoté par la force du Mal.

Nous avons dit que l’objectif de saint Luc était de nous montrer un Jésus le plus attrayant possible. En cela, Jésus est montré comme le Messie, venu pour « sauver » l’homme de sa perdition, de quelque manière que ce soit. Mais la perdition de l’homme ne dépend pas seulement de sa volonté en tant qu’être humain, mais parce que indépendamment de lui, il y a « une force » qui peut le désorienter pour ne pas suivre la voie de Dieu.

Par conséquent, il est indispensable que le porteur du salut présenté par saint Luc, en la personne de Jésus, soit plus fort que « la force » maléfique qui peut posséder l’homme. C’est ainsi qu’au début de la prédication de Jésus, saint Luc présente Jésus avec son autorité. Jésus n’est pas seulement l’homme qui prêche la Bonne Nouvelle avec sa parole mais aussi avec des actes concrets, réalisés avec une grande autorité. La guérison de la personne dans la synagogue de Capharnaüm était la première pour montrer cette autorité de Jésus (4, 31-37).

À part l’autorité de Jésus manifestée devant la force du Mal, Il voulait la montrer aussi devant ceux qui étaient considérés comme « des autorités » dans la communauté juive parce que, ces soi-disantes autorités ressembleraient également à « des forces maléfiques » qui empêcheraient l’homme de s’épanouir.

Ces autorités, à l’encontre de Jésus, ne voient pas d’abord l’homme qui doit être guidé et aidé par la Loi mais plutôt elles voient la Loi divine qui doit être respectée et se trouver toujours au-dessus de l’homme.

C’est ainsi que Jésus, comme Maître de la Loi, ayant toute l’autorité nécessaire devant ces dites « autorités », leur montre que l’homme est au-dessus de la Loi et non pas la Loi au-dessus de l’homme. Les différentes guérisons effectuées au jour du Sabbat étaient une manière pour Jésus de montrer aussi bien son autorité que l’importance de la place de l’homme devant la Loi. Et ces personnes guéries aux jours du Sabbat n’avaient pas seulement des maladies physiques mais des maladies psychosomatiques, c’est-à-dire qu’elles avaient besoin d’être guéries dans leurs corps et dans leurs âmes. À titre d’exemple la guérison d’un homme paralysé un jour de sabbat (6, 6-11) et la guérison d’une femme infirme, un jour du sabbat (13, 10-17)

Quoi qu’il en soit, l’enthousiasme de saint Luc de nous rapporter l’autorité de Jésus face à des autorités faillibles des docteurs de la Loi n’est qu’un élément de la puissance de sa divinité devant le mal et devant les oppressions des pauvres. Jésus a exercé son autorité pour faire taire et anéantir ses détracteurs. Mais selon Luc, la mission de Jésus ne se réduit pas à une manifestation d’autorité qui peut représenter un spectacle trompeur pour certains auditeurs, mais au contraire, c’est par la foi en Lui que tout homme peut être guéri et sauvé de ses péchés. Le salut est donné à tout homme sans distinction ni de race ni d’origine, et même les païens peuvent en bénéficier.

Ainsi, saint Luc nous rapporte des personnes guéries par Jésus grâce à leur foi. À titre d’exemple : la purification d’un lépreux était possible, pour donner suite à la demande de ce dernier, suppliant Jésus de le purifier car il croyait en sa puissance et en sa divinité (5, 12-16) ; de même la guérison d’un paralysé (5, 17-26) est devenue comme un signe de pardon que Dieu peut accorder à tout croyant, même par l’intermédiaire d’un tiers. C’est dans cette même idée que s’inscrit la guérison de l’enfant du Centurion, grâce à la foi de celui-ci (7, 1-10).

Toujours dans le même ordre, la guérison des dix lépreux (17, 11-19), dont un seul, un Samaritain, savait rendre grâce à Jésus, est le signe de la guérison d’une humanité maladive qui ne se limite pas au seul peuple élu. Les lépreux écartés de la société à cause de leur maladie sont une image des pécheurs qui se sont éloignés de Dieu. Mais Jésus vient pour rendre aux pécheurs malades leur dignité de fils et filles de Dieu.

En résumé, on peut dire que la plupart des guérisons opérées par Jésus et qui nous sont rapportées par saint Luc ne sont pas donc seulement des guérisons de corps malades qui ont besoin de retrouver la santé, mais aussi d’âmes torturées par le péché et par la force du Mal qui ont besoin d’être libérées.

Ce qui signifie que la maladie de notre corps, si elle ne provient pas directement de la maladie de notre âme ou si elle n’affecte pas immédiatement notre âme, pourrait être une plaque tournante où notre corps et notre âme se croisent.

III – L’ONCTION DES MALADES

1-     L’onction des malades : un sacrement de l’Église pour accompagner la personne malade.

C’est le point culminant de cette réflexion où je dois vous parler de « Jésus avec les malades, en sous-entendant l’onction des malades ». Cette partie est la plus importante pour moi – j’espère qu’elle l’est pour vous aussi – en tant qu’aumônier de l’hôpital où je suis appelé à administrer le sacrement des malades presque tous les jours. Ce n’est pas parce que je suis capable de le faire mais c’est parce que l’Église m’a donné le pouvoir de le faire par le sacrement de l’Ordre que j’ai reçu.

Alors en disant que l’onction des malades est un sacrement de l’Église qui accompagne les malades c’est parce que, selon le Catéchisme de l’Église catholique au N° 1118, « les sacrements sont « de l’Église » en ce double sens qu’ils sont « par elle » et « pour elle », c’est-à-dire que c’est l’Église qui célèbre les sacrements pour le bien spirituel de ses membres.

Par définition, toujours selon le Catéchisme de l’Église catholique, « Les sacrements sont des signes destinés à donner ou à augmenter la grâce sanctifiante des croyants », c’est-à-dire que les Sacrements sont des « moyens » par lesquels la grâce de Dieu est donnée, sans cesse et en abondance aux croyants, par l’intermédiaire de l’Église.

Et cela parce que les croyants en ont bien besoin tout au long de leur vie d’où l’institution des sept sacrements par l’Église (à savoir, le baptême, la réconciliation, la communion, la confirmation, le mariage, l’ordination ou le sacrement de l’Ordre et l’onction des malades ou le sacrement des malades). Ces sacrements sont sensés accompagner les croyants tout au long de leur vie terrestre.

En revanche, il n’est dit nulle part dans les évangiles que Jésus-Christ appliquait l’onction d’huile sur les malades. Nous pouvons constater seulement que dans tous les évangiles, Jésus guérit des malades. Ces guérisons « constituaient des signes pour le Règne de Dieu » étant donné que « le Règne de Dieu est une vie au service de la vie ».

En effet, si le Christ est venu pour sauver les hommes et les faire entrer dans son Royaume, c’est en les guérissant que cet objectif peut être atteint. C’est pourquoi la plupart des guérisons opérées par Jésus-Christ étaient liées au pardon des péchés.

Jésus n’avait donc pas directement pratiqué l’onction des malades mais c’est aux apôtres qu’il a donné le pouvoir de le faire : « Ayant réuni les Douze, il leur donna puissance et autorité sur tous les démons et il leur donna de guérir les malades » (Lc 9, 1). Et dans Mc 6, 13, on dit que « les disciples chassaient beaucoup de démons et ils faisaient des onctions d’huile à beaucoup de malades et ils les guérissaient ».

Cela s’était passé après la Résurrection du Christ, les disciples, sous la direction de l’Esprit Saint, avaient continué ce que le Seigneur Jésus leur demandait. Ils ont continué d’exercer le ministère de guérison. Les Actes des Apôtres nous rapportent la guérison du boiteux de la Belle Porte (Ac 3, 1) et celles des Samaritains rencontrés par le diacre Philippe (Ac 8, 7), celle de Publius qui hébergea Paul dans l’île de Malte (Ac 28, 8).

Cependant, ce que l’Église a pris comme norme liturgique du sacrement des malades se trouve dans l’Épître de saint Jacques : « Si l'un de vous est malade, qu'il fasse appeler les anciens de la communauté qui prieront pour lui en pratiquant une onction d'huile au nom du Seigneur. Leurs prières, inspirées par la foi, sauveront le malade, le Seigneur le relèvera, et s'il a commis des péchés, ils lui seront pardonnés. » (Jc 5, 14-15).

Nous pouvons observer dans cette Épître de saint Jacques tous les éléments nécessaires voire indispensables de l’onction des malades que l’Église pratique aujourd’hui : les anciens, représentés par le ministre du culte donc les prêtres, l’onction d’huile, la prière et le pardon des péchés dont les malades peuvent bénéficier. C’est à partir de là qu’est tirée la formule du rituel de l’onction des malades : en commençant par le prénom de baptême de la personne, lui disant : « par cette onction sainte, que le Seigneur, en sa grande bonté, vous réconforte par la grâce de l'Esprit Saint » (Amen !) ; « Ainsi, vous ayant libéré de tous péchés, qu'il vous sauve et vous relève » (Amen !).

Ici je voudrais ouvrir une parenthèse pour donner mon avis sur la raison pour laquelle le diacre ne peut pas administrer l’onction des malades alors qu’il peut connaître les malades, mieux que le prêtre. D’autant plus qu’il est parfois difficile de trouver un prêtre pour se rendre auprès des personnes mourantes.

Je ne donne pas cette conférence pour répondre à cette question ni pour résoudre cette difficulté qui me préoccupe moi-même. Mais, je voudrais tout simplement apporter un petit éclairage :

En fait, c’est depuis le concile de Trente (1563) qu’il est interdit aux diacres de donner le sacrement des malades. Cette interdiction est remise à jour par le Concile Vatican II et par le droit canon de 1983 comme dans le Catéchisme de l’Église catholique. Une note de la Congrégation pour la doctrine de la foi l’a encore confirmé en 2005 : « Seuls les prêtres sont les ministres de l’onction des malades ». Cette interdiction est malheureusement mal comprise par beaucoup mais il n’est pas encore temps pour l’Église de l’abroger.

Malgré cela, la seule explication qui pourrait nous convenir reste dans l’importance du ministère du prêtre avec le pouvoir d’absoudre les péchés. Car si le sacrement de l’onction des malades est celui de pratiquer ce que le Seigneur Jésus avait fait pour guérir les malades, l’Église ne veut pas minimiser le lien entre la guérison et le pardon des péchés, comme nous l’avons évoqué, précédemment. Alors que, seul, le prêtre a reçu le pouvoir d’absoudre ou de pardonner les péchés.

Cela ne veut pas dire que le diacre ou les autres personnes qui assistent un mourant ne peuvent rien faire sans le prêtre. Toute prière, à l’instar des sacrements de l’Église, « a son efficacité ». C’est notre « grand-frère » saint Thomas qui l’a dit et il a même rajouté que « la puissance de Dieu n’est pas prisonnière des sacrements ». Autrement : les sacrements de l’Église sont des moyens de grâce, comme nous l’avons dit dans la définition, mais la prière de chacun des croyants peut également s’ouvrir à la générosité et à la grâce de Dieu pour les accueillir en retour.

Ce qui est donc important c’est notre présence auprès des personnes malades pour témoigner de notre affection et de l’amour de Dieu pour elles. Une idée qui ferme ma parenthèse et nous fait passer au dernier titre de notre conférence.  

2-     L’Onction des malades : manifestation de la miséricorde et de la compassion de Dieu dans le Christ

Nous avons déjà longuement parlé de la miséricorde et de la compassion de Dieu dans l’évangile de saint Luc et nous avons mis l’accent sur la « bravoure » de Jésus pour montrer devant ses détracteurs que Dieu aime tous les hommes, comme un père aime ses enfants.

Dans l’exemple de l’enfant prodigue, il est montré que celui qui s’éloigne de Dieu à cause du péché se perd par lui-même car Dieu ne cesse, avec impatience, d’attendre son retour. De même, celui qui est malade comme celui qui commet le péché se trouvent dans un état de faiblesse et de fragilité. Alors, le même amour, la même miséricorde et la même compassion de Dieu doivent se manifester et se faire sentir avant même que la personne concernée les demande. À vrai dire, la personne malade en a besoin même si parfois elle hésite d’en parler à ses proches familles.

C’est pourquoi, avec l’onction des malades, l’Église témoigne de la présence de Dieu auprès des malades. Le sacrement des malades signifie en ce moment précis que Dieu peut apporter aux malades la guérison de son corps et de son âme. Dieu, en Jésus-Christ, se rend présent pour que les malades puissent unir leurs souffrances à celles de Jésus-Christ souffrant sur la Croix. Par conséquent, ces souffrances, vécues et supportées dans la foi, ne sont plus des vaines souffrances, car elles représentent des témoignages pour la foi.

Dans l’Ancien Testament, entre autres usages, l’huile était utilisée pour l’onction des rois, des prophètes et des prêtres. Le Mashiah (en hébreu) ou le Christos (en grec) désignent celui qui a reçu l’onction d’huile. Et la raison de cette onction se trouve dans le fait que l’huile pénètre le corps de celui qui la reçoit pour le marquer mais surtout pour que celle-ci devienne sa force. C’est pourquoi, l’huile sert aussi à guérir, à soigner les plaies. Et ainsi dire que toutes les vertus que l’huile possède symbolisent tout ce que Dieu peut donner aux personnes malades : le réconfort, la force et la guérison.

L’onction des malades s’avère donc comme un rappel auprès des malades, pour les rassurer que, malgré leurs maladies, Dieu ne les abandonne pas. Par ce sacrement, l’Église les accompagne et manifeste sa compassion et son soutien fraternels. Si un membre du Corps du Christ est malade, c’est le Corps tout entier qui peut le ressentir. Mieux encore, le malade, éprouvé et défiguré par sa maladie doit être rassuré car, en lui et par lui, éprouvé et défiguré, le Christ est présent.

Enfin, l’onction des malades, en lien avec la guérison et le pardon des péchés que nous avons vu dans l’évangile de saint Luc, participe à la libération et au salut de l’homme voulu par Dieu. Donc elle participe à l’accomplissement de la Mission du Christ dont la finalité est de faire entrer tous les hommes, sains et saufs, dans le Royaume de Dieu.

CONCLUSION

Nous arrivons maintenant à la conclusion de cette conférence où, comme à l’introduction, je voudrais vous la résumer en trois points :

Le premier consiste à vous répéter que si tous les sacrements, institués par l’Église doivent accompagner l’homme dans sa vie de pèlerin du Royaume, même si l’onction des malades se positionne apparemment au rang 7ème des sacrements, il n’est pas plus le sacrement des mourants que le sacrement de vie. C’est pour cette raison que, depuis le Concile Vatican II (1972), l’Église a laissé derrière elle la considération d’une extrême-onction ou d’un sacrement des mourants pour donner place au sacrement de vie ou à l’onction des malades.

Dans mon deuxième point de conclusion, il est important de retenir le sens spirituel de la maladie qui ne consiste pas seulement à considérer la faiblesse et la fragilité des personnes malades mais aussi à regarder ses valeurs vitales. Dans ce sens, en tant que croyants en Christ, la maladie du chrétien que nous sommes s’avère comme une épreuve de la foi ou bien comme « un chemin d’initiation » comme dit Maxime GIMENEZ, pour sonder notre capacité de vivre et de croire. C’est dans l’épreuve de la maladie que nous pouvons toucher l’endroit le plus important de notre être, à savoir notre esprit et notre âme.

Enfin, le troisième point final de ma conférence est celui de vous rappeler que les personnes malades peuvent devenir des lieux privilégiés de la présence de Dieu. C’est le Christ souffrant qui se manifeste dans et par leurs visages défigurés par les maladies. Ainsi, par le sacrement de l’onction des malades, c’est Dieu, en Jésus-Christ qui se rend présent pour donner la guérison et le salut aux personnes malades.

Nous n’avons donc plus à attendre l’agonie ou la mort pour appeler le prêtre, car Jésus-Christ est présent dans l’onction des malades pour donner la force et le réconfort, ainsi que la guérison à nos frères et nos sœurs malades.

Frère Chrystophe Randrianbololona o.p.

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